vendredi, 15 mai 2015
Du mauvais snobisme
L’antimozartisme est un snobisme réactionnel.
11:03 Publié dans Clef de sol | Lien permanent
vendredi, 13 mars 2015
De la conquête à la clôture du Far-West
L’Homme qui n’a pas d’étoile de King Vidor est un western lumineux et riche dans la composition duquel entrent plusieurs ingrédients, dont la comédie, la chanson et l’érotisme (pour l’époque) ; mais ce n’est pas par ces trois ingrédients qu’il est le plus intéressant. L’intérêt du film réside surtout dans l’exemplarité morale d’un aîné vis-à-vis d’un plus jeune (les rapports entre Kirk Douglas et William Campbell) et la transformation de l’Ouest sauvage en espace clôturé. A la nostalgie de l’open range, qui est l’espace de la liberté primitive, se joint l’acceptation raisonnée de la clôture qui symbolise la civilisation moderne.
Le personnage principal incarné par Douglas – celui qui n’a pas d’étoile, c’est-à-dire pas de point fixe – exprime cette double position tout à fait déchirante (qui reflète le conservatisme contrarié de Vidor) : alors même qu’il déteste physiquement comme symboliquement les clôtures, il finit par les défendre contre l’esprit de conquête des grands propriétaires et les empiètements de leurs hommes de main. Le film marque ainsi la fin de la conquête de l’Ouest et l’entrée dans la modernité économique.
11:26 Publié dans Kino | Lien permanent
lundi, 09 mars 2015
Trois hommes de bien au milieu du chaos
Trois personnages dominent ce western classique et néanmoins complexe qu'est L’Homme aux colts d’or d’Edward Dmytryk : le mercenaire ou prévôt (Henry Fonda) payé par une petite ville pour la protéger contre une bande de forbans, le tenancier d’un saloon (Anthony Quinn) qui est son ami et qui le protège voire le seconde, le shérif suppléant (Richard Widmark) qui est un ancien forban et qui doit tenir tête au chef de la bande comme au prévôt pour faire triompher le droit.
Les trois hommes qui ont une face sombre ou un passé trouble défendent voire représentent une certaine idée du bien. Mieux encore, leur destin est celui d'une rédemption ou d'un sacrifice. La rédemption est d’abord celle de l’ancien forban devenu shérif par dégoût de la lâcheté et de l’injustice. C’est également celle du mercenaire que meut l’intérêt, mais aussi le courage et l’amitié, et qui finalement, dans un geste magnifique (le jet des colts d’or), renonce au mercenariat. Reste le troisième homme qui, sous des dehors cyniques, incarne à sa façon le sacrifice puisqu’il a consacré sa vie à la dévotion et à la protection de son ami.
L’amitié est un des grands thèmes du film qui est traité sur un mode ambigu ou simplement extrême. A cet égard, la douleur profonde et la quasi-démence (voir l’incendie volontaire du saloon) dans lesquelles la mort de son ami plonge le personnage joué par Fonda impressionnent et interrogent (quelle était donc l’origine ou la nature de cette amitié aussi forte ?). L’autre grand thème est évidemment celui du droit et de la justice. Le personnage joué par Widmark, avec ses doutes et ses faiblesses, symbolise à merveille l’avènement difficile du droit dans le Far West. Mais l’Etat de droit triomphe finalement du désordre, de l’injustice et de la justice privée. C’est aussi cela que montre ce grand western.
11:16 Publié dans Kino | Lien permanent
samedi, 07 mars 2015
Prostitution
La libération des mœurs a rendu pour partie inutile la prostitution ; celle-ci s'est diffusée ou diluée dans toute la société.
11:48 Publié dans Eros | Lien permanent
mercredi, 04 mars 2015
Ce qu'est la parité
Qu’a-t-on encore le droit de dire sur les femmes ? A peine qu’elles sont différentes des hommes, sauf à passer pour sexiste ou essentialiste (dans le meilleur des cas). Que l’on dise au moins que l’idée de la parité, sous couvert d’universalité biologique, est la dernière manière d’essentialiser les sexes.
10:42 Publié dans Masculin/Féminin | Lien permanent | Tags : parité
mardi, 03 février 2015
La Nuit nous appartient ou le Retour du fils prodigue
La Nuit nous appartient de James Gray est un film qui se situe entre Scorsese et Cimino. Trois hommes appartenant à la communauté polono-américaine de New York dans les années 1980 : un père policier et ses deux fils, l’un également policier, l’autre tenancier trouble de boîte de nuit. Une tentative d’assassinat contre le bon fils, puis la mort du père rédemptent le mauvais fils.
Tous les ingrédients du grand cinéma américain sont réunis ici : la division de la famille, la lutte entre le bien et le mal, la vengeance et la rédemption. Ce qui constitue le fond commun aux deux genres typiquement américains que sont le western et le polar (ou le film noir). Les grands espaces extérieurs sont seulement remplacés par de grands espaces confinés, aux sublimes lumières mordorées. La belle musique de Kilar, qui s’apparente par la polonité et les sonorités à celle de Preisner, souligne la dimension religieuse de ce qui ressemble à un moderne – et très violent – retour du fils prodigue.
16:51 Publié dans Kino | Lien permanent
lundi, 12 janvier 2015
Renan trahi ou dénaturé
On a pris à Renan son « vivre ensemble » et, d’un indicatif, on a fait un impératif.
11:53 Publié dans Civilisation | Lien permanent
samedi, 03 janvier 2015
La vieille peur des bien-pensants
Les bien-pensants d’aujourd’hui sont comme ceux d’hier : ils dénoncent ce qui les dérange et donnent foi à ce qui les rassure.
11:12 Publié dans Médication | Lien permanent | Tags : bernanos
vendredi, 02 janvier 2015
Une vengeance impossible
Il est impossible de se venger du bruit par le silence.
14:09 Publié dans Sophia | Lien permanent | Tags : aphorismes
jeudi, 02 septembre 2010
L'Existentialisme précoce de Moravia
Alberto Moravia passe pour avoir été le premier romancier existentialiste avant la lettre. Bien qu’elle soit contestable si l’on pense par exemple à Svevo, cette réputation a une part de vérité. Dès son premier roman paru en 1929, Les Indifférents, l’écrivain italien – qui avait alors vingt-deux ans – a créé un monde d’enfermement où les personnages se caractérisent par une insensibilité vicieuse et une inactivité pathologique.
Ils habitent dans une maison bourgeoise, aussi vaste que poussiéreuse, encombrée de meubles et d’objets pesants. Le verbe habiter doit être pris ici dans un sens passif, tant l'idée d'habitude obsède jusqu'à la nausée les cinq personnages du roman. Dans cet intérieur étouffant, tout est rite ou répétition et on rêve de liberté et de scandale – non par révolte, mais par ennui. Ou par révolte contre l'ennui.
Le confort de la maison, au lieu d’en faire un havre de paix, en fait un bain de culture pour le ressentiment. Tous les personnages, sans s’aimer ou s’estimer beaucoup, restent néanmoins collés les uns aux autres, solidaires malgré eux de leur médiocrité et de leur insatisfaction. Ils sont tout à la fois veules et cyniques, oisifs et méprisants. Et pourtant, ils sont conscients de leur état au point, comme Michel et Carla, de se mépriser eux-mêmes.
Ne pouvant s’imposer face à Léo, l’amant de sa mère, Michel hésite entre la feinte et la fuite. Il voudrait avoir des réactions ou des sentiments, mais il n’y arrive pas. Il ne se sent pas assez concerné par ce qui l’entoure pour ressentir quelque chose, même envers Lisa, l'amie de sa mère, avec laquelle il entame une liaison. Cependant, il rêve d'un monde où l’âme pourrait adhérer à la réalité extérieure. Par là, il annonce et préfigure même Roquentin plus que Meursault.
Carla partage les mêmes velléités que son frère, mais elle croit avoir sur lui un avantage : sa liaison avec Léo. Celle-ci finit pourtant par la convaincre que sa vie ne changera jamais et que le mariage serait peut-être pis que le célibat ; Michel ne serait même pas capable de tuer Léo, comme dans la fameuse affaire Murri, pour l’en libérer. Les indifférents sont condamnés à le rester, comme dans un enfer perpétuel.
01:35 Publié dans Lettres | Lien permanent | Tags : existentialisme, svevo, moravia