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dimanche, 07 avril 2019

Du bel orientalisme à Marmottan

Tout commence par Ingres et sa Petite baigneuse qui donne le la de l’exposition, puisque s’y trouvent réunis tous les éléments d’un orientalisme intérieur : sensualité, enfermement et mystère ; mais on voit un demi-siècle plus tard le chemin qu’a parcouru cet orientalisme à travers Le Massage, scène de hammam d’Edouard Debas-Ponsan où les trois éléments se fondent dans la représentation d’un fantasme sexuel (une femme nue allongée sur le ventre est massée par une Nubienne aux seins nus).

Mais il est un autre orientalisme, extérieur cette fois, qui se caractérise par le désert, la désolation et la lumière, dont l’un des peintres les plus remarquables est Eugène Fromentin, comme dans sa Rue Bab-el-Gharbi à Laghouat où des personnages allongés à l’ombre d’une grande lumière font penser à des corps au repos aussi bien qu’à des cadavres après un massacre.

Deux orientalismes s’opposent ainsi, l’un centré sur la figure, l’autre sur le paysage, tendus respectivement vers la géométrie et la lumière. Pourtant, les deux orientalismes finissent par se rejoindre en suivant la voie de la liberté ou de la simplification des formes dans une sorte de pré-abstraction, comme dans Oriental de Kandinsky, qui est un bel assemblage de couleurs, ou Minaret à Sidi Bou Saïd de Marquet, où le bord de mer devient une réalité à deux dimensions. L’Orient qui était un autre monde n’est plus qu’un objet comme un autre pour un Occident reconstructeur ou déconstructeur de formes.

11:08 Publié dans Beaux-arts | Lien permanent | Tags : histoire de l'art

lundi, 02 avril 2018

De la singularité du Tintoret dans l'école vénitienne

L’intérêt de l’exposition du musée du Luxembourg se trouve dans son titre même : Tintoret, la naissance d’un génie. Ou comment l’un des trois grands de la peinture vénitienne du Cinquecento s’est tôt distingué des maîtres de son temps – Titien en particulier – et de ses modèles avoués – Michel-Ange notamment – par sa manière plus que par le choix de ses sujets.

Pour se démarquer de la peinture officielle – avant de finir par l’incarner à son tour, il a pris le parti de la rapidité d’exécution, du décentrement du sujet ou encore de la vue en contreplongée (dans les scènes dramatiques surtout, comme dans Jupiter et Sémélé ou Judith et Holopherne). Même pour l’art du portrait, il a privilégié le trois-quarts et surtout le fond noir afin de se concentrer sur le visage ou l’œil, dans lequel se réfléchit la lumière et où se révèle le fond de l'âme. Rien à voir avec la solennité des portraits de cour peints par Titien ou même Véronèse.

Il y a chez le Tintoret (Tintoretto : le petit teinturier) la recherche d’une vérité qui ne passe pas simplement par le dessin ou la couleur, mais par une géométrie désaxée (Jésus parmi les docteurs), une perspective en diagonale (Le Christ et la femme adultère) ou un raccourci en biais (La Princesse, saint Georges et saint Louis). Assurément, il a fait, comme les autres grands peintres de l’âge d’or vénitien, la transition entre la Renaissance et la période baroque ; mais il a fait mieux encore, en marquant une étape dans l’évolution de la peinture vers une plus grande liberté du trait, sinon du sujet.

13:11 Publié dans Beaux-arts | Lien permanent | Tags : histoire de l'art, tintoret

lundi, 11 avril 2016

Un dimanche à Giverny

Voilà un beau lieu gâté par le tourisme de masse. On y croise plus de consommateurs de culture que d’amateurs d’art. Dans le domaine de Monet, un hangar rempli de produits dérivés, des plus évidents aux plus invraisemblables, jouxte l’ancienne maison du maître. Une frénésie d’achats y saisit les touristes surtout originaires des pays anglophones ou du Japon. Autant l’intérêt des Japonais pour l’impressionnisme se comprend bien par le rôle qu’a joué la découverte de l’estampe japonaise dans la naissance de ce mouvement, autant celui des Anglo-Saxons se comprend moins bien, sinon par leur goût de la nature et leur dilection pour l’art paysagiste. Mais ne s’agit-il que de cela ? La popularité dont jouit l’impressionnisme vient moins des dispositions de certains peuples à aimer le style impressionniste qu’à l’accessibilité de celui-ci pour le plus grand nombre. En vérité, on peut aimer les impressionnistes sans aimer la peinture en général. Mieux ou pire, on peut admirer Monet, Manet ou Renoir sans connaître l’histoire de l’art. Et la raison tient aux motifs privilégiés par le mouvement impressionniste.

00:21 Publié dans Beaux-arts | Lien permanent

mardi, 08 juin 2010

Munch ou l'angoisse de vivre sublimée en art

Edvard Munch est né sous le signe du malheur. Il a grandi et vécu dans une grande proximité avec la maladie et la mort, qui n'ont cessé de frapper, après sa mère et sa sœur, tous ses proches. En lui, Eros luttait perpétuellement avec Thanatos, mais c'est l'instinct de mort qui l'emportait à chaque fin de cycle de sa vie, en laissant l'artiste toujours plus seul et angoissé que jamais.

Parmi les premiers tableaux exposés à La Pinacothèque, le bien connu Enfant malade (1886) donne le ton d'une œuvre dominée par l'angoisse de vivre. Mais celle-ci se trouve aussi dans La Femme au chapeau rouge sur le fjord (1891), un portrait de femme tout de bleu vêtue peint en pied sur deux fonds hachurés et superposés. On sent en cette femme aux mains nerveusement jointes un chagrin ou un tourment qui reflète celui du peintre lui-même. Sans doute est-ce la raison pour laquelle l’érotisme qui entoure généralement ses représentations de la femme - comme dans la série de la Madone (1895) - n'est guère présent ici.

Les années 1890 correspondent assez bien à la définition donnée par Strinberg de l’œuvre de Munch : « la peinture érotique de l’amour, de la jalousie, de la mort et le tristesse ». C’est tout cela qui se retrouve dans d’autres œuvres fortes comme Les Solitaires, qui représente un couple de dos face à la mer, ou La Jalousie, où un homme seul regarde d’un air désespéré le spectateur en tournant le dos à une femme enlacée avec un autre homme. Le clou de cette période sombre où Munch utilise essentiellement le noir et blanc est l’Autoportrait au squelette, où l’on voit une tête cadavérique émerger d’un fond noir comme du néant.

La couleur revient dans les années 1900 avec la technique de la surimpression sur gravure. L’univers de Munch s’égaie par l’apparition d’enfants et de baigneurs. Tout d’un coup, on croit être en présence d’une peinture fauve se situant entre Matisse et Vlaminck. Le thème de la solitude ne disparaît pas pour autant, figuré par un personnage debout au milieu d’un groupe d’enfants assis au bord de la mer. Il se retrouve dans La Femme qui, à travers trois femmes, représente les trois âges de la vie ou de l’amour : le romantisme, l’érotisme et le spiritualisme. Dans la même veine, s’inscrit La Danse de la vie, une danse à trois temps (la jeune promise, la femme mariée et la femme seule) qui dissimule à peine son caractère macabre.

A la même période appartient une belle série de lithographies sur l’alpha et l’oméga, correspondant à Adam et Eve. Munch réconcilie néanmoins la référence biblique avec le paganisme, comme dans La Forêt où le couple mythique entre dans une forêt comme dans une chambre noire. Dans Le Sevrage, la femme allongée joue avec le serpent tandis que l’homme assis demeure figé, les poings sous le menton, dans une attitude boudeuse. Mais en définitive, la femme n’est pas mieux lotie que l’homme : la descendance d’Omega ressemble à un groupe de petits singes. Et c’est au désespoir qu’est condamné l’Adam d’après la Chute, désormais seul et nu, se tenant le visage entre les mains dans un paysage tourbillonnant.

Les années 1910 ne sont pas les plus sombres pour Munch : il peint la vie dans des couleurs pastel et, au milieu de la Grande Guerre, une jolie série de nus. Mais la fin de la guerre constitue un nouveau tournant avec l’épidémie de la grippe espagnole qui frappe le peintre. Il fait son Autoportrait à la grippe espagnole dans lequel il cherche à faire sentir l’odeur du pourrissement. Il rejoint Derain dans la manière de concevoir la peinture comme une matière à part entière. Suit une série de portraits en pied qui n’appartient au classicisme que par le genre. Plus significativement encore, Munch donne dans les années 1920-30 d’intéressantes variations sur la mélancolie qui ont manqué à l’exposition du Grand Palais.

Le thème de la mélancolie résume ou domine en fin de compte l'œuvre de Munch. Le peintre n'avait pas nécessairement le modèle de Dürer en tête ; c'est son esprit qui vivait sous l'emprise de ce qu'on n'appelait pas encore la dépression. La maladie était son tourment, mais elle lui était aussi un refuge contre les exigences et les déceptions de la vie sociale. Mieux que sa signature, elle fut le salut de son art.

22:04 Publié dans Beaux-arts | Lien permanent | Tags : mélancolie, munch

mercredi, 05 mai 2010

Un monde de vanités

Dans la dernière exposition au musée Maillol, la vanité est entendue de manière exclusive comme la représentation d’un crâne. Cette conception, pour rigoureuse qu’elle soit, n’en est pas moins trop restrictive et paradoxalement extensive. La seule représentation d’un crâne fait-elle la vanité ? A l’inverse, une  nature morte sans crâne ne mérite-t-elle pas cette qualification ? Autre problème : les œuvres sont présentées selon une chronologie à rebours. Le parti pris est contestable, mais il peut se défendre avec le retour du genre dans l’art contemporain.

Une grande place est faite à Damien Hirst et à ses crânes conçus dans des matières peu communes – notamment celui recouvert de mouches et de résine. Moins saisissant, mais assez étrange tout de même, un crâne transpercé de deux couteaux de cuisine et, dans les orbites des yeux bouchées par des coquillages, de deux aiguilles à tricoter est placé au centre d’un disque blanc supposément solaire. Qu’a voulu représenter l’artiste ? Le titre répond : La Mort de Dieu. La vanité ici serait plutôt comme une crucifixion postmoderne. En matière de crucifixion, on peut préférer l’Ecce homo de Delvaux que l’exposition donne aussi à voir. Un Christ en croix est environné par des squelettes vivants dans une lumière grise. Il est crucifié, mais en chair ; ils sont vivants, mais sans chair. Le chiasme symboliquement se comprend.

Extension de la vanité par le motif du crâne, mais aussi dans le temps. L’exposition fait remonter le genre né entre le XVIe et le XVIIe siècle dans ses deux manières, la méditation et la nature morte, jusqu’au Memento mori des mosaïques de Pompéi. Il n’y a pas lieu de s’en offusquer. Après tout, la vanité n’a pas d’autre fonction que cet antique rappel de la finitude. Mais un autre territoire se trouve annexé à la vanité : celui de la mélancolie. Un beau tableau de Fetti que l’on avait vu dans la remarquable exposition organisée par Jean Clair se retrouve ici, raccroché au thème de la vanité par la présence d’un crâne.

Plus près de la vision fantastique que de la simple vanité est le Memento mori de Giovanni Martinelli. La mort représentée sous la forme d’un squelette portant un sablier fait irruption au milieu d’un dîner. Il faut voir le mouvement d’effroi qui saisit les convives. L’un d’entre eux signifie par un geste de la main qu’il n’est pas concerné. Un autre sur l’épaule duquel la main de la mort s’est posée semble dire : « Quoi ? Mais cela ne peut être moi ! » Une autre vision saisissante, bien que moins fantastique : Saint Jérôme en méditation de Pietro Paolini. Le saint lit à sa table de travail, où apparaît un crâne entre des papiers épars, dans une obscurité inquiétante.

Assez logiquement, la vanité voisine avec la mystique. Georges de La Tour a peint un saint François d’Assise en pleine extase, à moins que ce ne soit une crise de doute comme en témoigne le crâne qu’il serre entre ses mains. Zurbarán, de son côté, a représenté un moine en bure agenouillé pour la prière tenant sur ses mains jointes un crâne. Le moine essaie-t-il de surmonter le chagrin ou la peur de la mort par la prière ? En tout cas, cette œuvre magnifique à la fois par son plan géométrique et le traitement des ombres et de la lumière constitue le clou de l’exposition.

Avec la déchristianisation de la société, la vanité a disparu quelque peu de la scène artistique en dépit des Trois crânes de Géricault. Des explications murales font commencer une nouvelle ère de la vanité avec un tableau de Cézanne. Mais ce sont deux autres tableaux surréalistes qui retiennent l’attention : La Complexité du vampire de Clovis Trouille, qui montre une Gitane prostrée sous une guillotine sanguinolente rêvant à des têtes décapitées, et le Quasimodo genitis de Max Ernst, qui laisse voir des squelettes dans les plis d’un rideau sous une lune voilée.

Au sortir de la Guerre, la vanité mélancolique a laissé la place à une vanité d’après la catastrophe. Une composition de Buffet représente un homme nu et décharné dans une lumière grise comme de retour d’un camp de concentration. La mélancolie revient néanmoins dans un tableau de Jean Hélion qui représente une femme charnue couchée sur une table baignant dans une lumière du Midi. Mais il s’agit d’une parenthèse ensoleillée dans un monde désormais voué au grand macabre à l’image des crânes de Damien Hirst qui viendront plus tard.

22:26 Publié dans Beaux-arts | Lien permanent | Tags : mélancolie, histoire de l'art

vendredi, 30 octobre 2009

Des rivalités vénitiennes au Louvre

Une belle exposition temporaire qui, mettant en regard les grands peintres du XVIe siècle vénitien, fait ressortir les influences et différences entre eux. Titien apparaît comme le grand maître que les autres, Tintoret puis Véronèse, imitent avant de s’en démarquer. Il reste un maître incomparable pour le portrait de cour où il allie la finesse des traits à la magnificence des couleurs. Son œuvre demeure un modèle indépassable pour certains sujets comme la Vénus au miroir, même s’ils donnent lieu à de passionnantes variations du Tintoret et de Véronèse. Il est d’autres sujets néanmoins, comme les pèlerins d’Emmaüs, qui permettent à Véronèse de déployer tout son talent de peintre décorateur et d’égaler, sinon de dépasser, Titien par la richesse et la puissance du traitement.

Il faudrait encore mentionner les scènes du baptême du Christ ou de la solitude de saint Jérôme où les trois grands peintres rivalisent de mysticisme, sans que le plus mystique d’entre eux – Tintoret – l’emporte toujours, et celle du viol de Lucrèce par Tarquin, où ils se distinguent par l’accent mis sur la violence ou la sensualité. Mais il serait injuste de n’évoquer que les trois grands sans faire mention des autres peintres exposés, qu’il s’agisse de Giorgione, l’artiste théoricien de la peinture, ou Bassano, dont le double mérite tient à la remarquable technique du luminisme, préfigurant le clair-obscur, et à la promotion de l’animal comme sujet à part entière dans la peinture (Deux chiens de chassé liés à une souche).

00:31 Publié dans Beaux-arts | Lien permanent | Tags : tintoret, histoire de l'art

samedi, 12 septembre 2009

Art et puissance

L’histoire des arts a des liens étroits avec celle de la puissance, particulièrement pour la peinture. La peinture serait-elle plus que la musique l’art des puissants ? L’art des puissants ou l’art de la prospérité : songeons en particulier à la peinture italienne ou à la flamande, puis à l’hollandaise. A la fin du XVIIIe siècle, une grande peinture anglaise est née avec la révolution industrielle. Au début du XXe siècle, le retour de l’Allemagne au premier plan en peinture a coïncidé avec l’apogée de sa puissance industrielle. Et que dire de la peinture américaine après 1945 ?

23:00 Publié dans Beaux-arts | Lien permanent | Tags : histoire de l'art

lundi, 25 mai 2009

La Métaphysique antiquisante de Giorgio De Chirico

De Chirico est « l’animateur de la centrale d’énergie métaphysique », selon le mot de Paul Guilhaume. La métaphysique renvoie ici, non à un autre monde, mais à une autre réalité, se situant entre le rêve et la convalescence. La peinture est seulement le moyen de son dévoilement.

Très tôt, la métaphysique de De Chirico trouve son lieu symbolique : une vaste place entouré de portiques avec en son centre une statue représentant à l’antique un personnage allongé dans une lumière post-méridienne (La Méditation ou la méditation automnale, 1912). Cette peinture dite métaphysique est née de la rencontre de la poésie d’Apollinaire avec la nostalgie de l’Italie renaissante (et, spécialement, de la « ville carrée » de Ferrare).

Il y a chez De Chirico à la fois de la transparence et du mystère. Certaines de ses œuvres se présentent même comme des énigmes à résoudre. Ainsi L’Enigme de l’horloge (1911) : l’heure indiquée par l’horloge correspond-elle à la lumière du jour ? De même, L’Enigme d’un jour (1914) : l’homme vu de dos dressé sur un piédestal est-il un personnage vivant ou une statue ? D’autres tableaux ont l’apparence d’un casse-tête à l’image du bric-à-brac d’Intérieur métaphysique (une grande usine), qui peut se comprendre d’une façon proprement surréaliste comme le rêve d’usine d’un atelier. Chez De Chirico, le mystère tient principalement dans le rapport de l'être avec le temps.

Arrive le tournant du classicisme dès les années 1920. Des correspondances poétiques ou symboliques apparaissent entre De Chirico et Magritte, qu’il s’agisse des Jeux terribles (1925), où un mannequin assis portant un amas de jouets rappelle L’Art de la conversation, ou encore de la série sur les bains mystérieux, dont les personnages figés paraissent sortir de l’univers du maître belge du surréalisme. L’humanité est statufiée à la ressemblance des dieux antiques.

Il est encore pour De Chirico une autre manière d’être classique, qu’il ne cessera de reprendre par la suite, en se considérant lui-même comme un classique et en s’imitant lui-même ou en revisitant sa première peinture métaphysique. Une évolution se dessine néanmoins à travers la présence de mannequins qui remplacent les modèles et éclipsent les statues. Ces mannequins reproduisent les gestes des hommes (La Comédie et la Tragédie, 1926) ou contemplent un tableau représentant un paysage dans une belle inversion symbolique entre artifice et nature (Le Peintre paysagiste, 1930).

Le néo-classicisme de De Chirico est à chercher du côté des paysages, des natures mortes et surtout des autoportraits peints à la manière des grands maîtres. Une belle série datant des années 1940 montre le peintre dans une posture aristocratique sous une lumière et des couleurs tour à tour florentines, vénitiennes et flamandes. Il pousse sinistrement l’autoportrait jusqu’à la représentation posthume de lui-même sous des traits cireux ou cendrés. Tout cela en dit long à la fois sur les explorations désespérées et les obsessions mortifères du peintre.

Après cette mort symbolique, De Chirico ne peut que renaître à lui-même, en revenant à sa première manière. Il reprend les œuvres de sa période métaphysique en y apportant de nouvelles touches, témoins d’une vie longue. Il propose de nouvelles séries sur les places d’Italie, les mannequins et les bains mystérieux, parfois en croisant ces différents thèmes. On pourrait dire qu’à vouloir désacraliser l’art par la duplication ou la démultiplication, il est tombé dans une nouvelle fétichisation de l’art (le travers de Warhol). En vérité, l’artiste est à la recherche d’une synthèse de son art.

Comme à la fin d’une odyssée, De Chirico en vient à représenter son parcours artistique sous les traits d’un nouvel Ulysse faisant de la barque dans sa chambre et allant d’un vieux tableau peint par lui-même à une fenêtre ouverte sur un temple antique (Le Retour d’Ulysse, 1968). Ce qui conduit à penser que la métaphysique de De Chirico est au fond, comme chez Heidegger, une nostalgie de l'Etre parménidien.

12:01 Publié dans Beaux-arts | Lien permanent | Tags : de chirico, magritte, heidegger

dimanche, 20 janvier 2008

La Politesse de l'art

Il y a un art de la politesse, mais il y a aussi une politesse de l’art. Sous l’Ancien Régime, l'art était une forme sublimée de la politesse. Le XIXe siècle a vu le passage d’un art fondé sur la politesse à l’impolitesse faite art. L’impolitesse est devenue effronterie ou provocation au XXe siècle.

17:57 Publié dans Beaux-arts | Lien permanent

dimanche, 29 octobre 2006

Histoires de peinture

La peinture italienne : un long été suivi d’un bel automne. La peinture flamande : un beau printemps suivi d’un lourd été. La peinture allemande : une histoire à trois temps comme un triptyque gothique. La peinture hollandaise : un âge d’or et un héros moderne. La peinture espagnole : deux âges d’or séparés par un génie noir. La peinture anglaise : deux âges d’argent suivis d’un âge de bronze. La peinture française : une longue ascension achevée en moderne apothéose. La peinture américaine : une divertissante postface, la fin de la peinture.

23:25 Publié dans Beaux-arts | Lien permanent | Tags : histoire de l'art