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dimanche, 25 juin 2006

La Tristesse cachée de Bonnard

On pourrait être tenté de voir en Bonnard le peintre du bonheur, des plaisirs ordinaires, nés des petits rites de la vie. C’est tout le contraire : il est le peintre de la solitude, de la tristesse inexprimée, de l’ennui né de la répétition.

L’un des premiers nus de Bonnard, intitulé L’homme et la femme, sépare les sexes après l’amour jusqu’à donner l’apparence d’un diptyque. La longue série des Nus à la toilette fait ensuite de la salle de bains le lieu de la solitude, de la solitude féminine, jamais de la communion des sexes. La sensualité n’est certes pas absente de ces tableaux ; mais il y a dans les torsions du corps à la toilette, dont le visage est toujours caché, quelque chose de la tâche répétitive et non du rituel érotique. La toilette acquiert seulement une dimension sacrale dans l’ultime série, plutôt sombre, d’une femme au bain, la baignoire tenant à la fois du cocon et du tombeau.

A l’opposé de la tristesse semblent être des œuvres ayant pour thème principal la nature. Certaines, d’inspiration païenne ou mythologique, dénonceraient un esprit épicurien voire dionysiaque à l’image des tableaux sur les saisons. D’autres pourtant renferment une mélancolie secrète, à peine soupçonnable, comme La Salle à manger à la campagne, aux éclatantes nuances de rouge, de jaune et de vert. Le bonheur qui s’en dégage est un bonheur extérieur, éphémère, presque accidentel. L’intemporalité des personnages contraste avec la temporalité de la lumière. On voudrait croire à une félicité complète, mais ce n’est qu’un instantané de bonheur.

Dans l’évolution de Bonnard, il y a un dévoilement plus qu’un changement. L’âme sombre du peintre peu à peu se découvre. L’équilibre entre plaisir des sens et mélancolie intérieure se rompt, la tristesse affleure partout. Les lignes surgissent, les couleurs se voilent et s’assombrissent. La série des autoportraits anticipe ce mouvement, à travers notamment l’Autoportrait à contre-jour, qui est l’image même de la mélancolie. Au bout du compte, particulièrement dans L’Atelier du mimosa, la mélancolie se fait désespoir.

Le paradoxe demeure d’un peintre profond qui tient la surface des choses pour le sujet principal de la peinture. Bonnard, qui vit dans un monde de sensations et non d’idées, recherche avant tout la séduction, le saisissement par la couleur. On pourrait le prendre pour un peintre superficiel s’il n’y avait du secret chez lui, du non-dit, du non-peint. Au fond, son parti pris artistique n’est peut-être qu’un point de vue philosophique qui ne laisse aucune place à l’espérance : pour Bonnard, on le sent, il n’est pas d’autre monde que celui-ci.

11:00 Publié dans Beaux-arts | Lien permanent | Tags : mélancolie, bonnard

dimanche, 08 janvier 2006

La Mélancolie, entre fascination et déception

L’exposition du Grand Palais (La Mélancolie - Génie et folie en Occident), due à Jean Clair, commence par l’Antiquité et des stèles funéraires grecques et romaines : la mélancolie avant tout est la pensée de la mort. L’attitude caractéristique du mélancolique (un personnage assis, la tête appuyée sur une main) apparaît déjà. On la retrouve aussi dans une statue de l’époque d’Auguste représentant Ajax. Le lien aristotélicien entre génie et mélancolie est ici figuré par un héros homérique.

La mélancolie ensuite devient péché sous le nom d’acédie. Un tableau en vignettes de Konrad Dinckmuth illustre les sept péchés capitaux, parmi lesquels figure l’acédie en lieu et place de la paresse, et leurs châtiments spécifiques. La chronologie est bouleversée par la présence d’une œuvre de Monsù Desiderio qui représente le châtiment suprême : une cathédrale creuse découvre des enfers inondés où tombe une foultitude de damnés sous le regard de deux divinités païennes. Ce qui pouvait se concevoir pour Monsù Desiderio se conçoit moins pour Max Ernst dont L’Ange du foyer illustre d’une manière bien incertaine le démon de midi qui tente l’acédique.

L’acédie est surtout figurée par la tentation de saint Antoine. Un tableau attribué à Bosch, mais bien dans son style, montre un saint Antoine recroquevillé sur lui-même, feignant d’ignorer les étrangetés qui l'environnent : un archer sortant d’un œuf, un singe avec une tête d’homme, une grenouille surmontée d’une voile de bateau, une araignée coiffée d’un casque, un homme avec un entonnoir dans l’anus qui entre dans un sac, des chauves-souris qui manipulent une catapulte et d’autres personnages animaliers qui mettent le feu à une église et en démontent le clocher. Schongauer donne à voir un Saint Antoine tourmenté par les démons, des bêtes à longues pattes qui le tiraillent en tous sens. Pour Cranach l’ancien, l’ermite finit par se confondre avec l’arbre sur lequel il repose et les démons, épousant les formes de la ramure, qui le tourmentent.

Assurément, Dürer apparaît comme le maître de la mélancolie avec Le Chevalier, la mort et le diable, Saint Jérôme, L’homme de douleur, Le Songe du Docteur ou la tentation du paresseux et la fameuse Melencolia I. Le mystère plane sur le personnage de la gravure (ange ou homme ? homme ou femme ?) et son regard tourné vers un ciel incertain – généralement, le regard du mélancolique ne quitte pas l’horizon de la terre. Mais ce n’est plus un saint ou un moine comme l’était l’acédique du Moyen Age, et la surcharge des instruments de mesure dénonce l’insatisfaction plus que la paresse de l’esprit humain. Chez Cranach l’ancien, le sujet de la mélancolie n’est pas non plus un homme de foi, mais une femme à la fois tentatrice et tentée, qui rêveusement, érotiquement faudrait-il dire, taille une branche d’arbre.

Dominante sous la Renaissance, une conception ambivalente de la mélancolie (génie ou folie), due en particulier au philosophe néo-platonicien Ficin, est illustrée par des tableaux de Bramante (Héraclite et Démocrite), Giorgione (Double portrait) et surtout Ghisi qui, dans son Rêve de Raphaël, montre bien toute cette ambivalence : Raphaël, bien qu’assiégé par des démons, peut compter sur la présence d’une nymphe qui viendra peut-être le sauver. Un regret toutefois : l’image de Raphaël est bien là, mais aucune de ses œuvres – la grande peinture italienne, qui sait être ô combien mélancolique, manque à l’exposition. La sérénité dans la mélancolie qu’eût pu illustrer une œuvre de Mantegna ou de Léonard l’est par celle de l’Anglais Hilliard : l’ironique portrait de Henry Percy, neuvième comte de Northumberland, que l’on voit allongé, accoudé, désinvolte, sur le gazon de son jardin.

La mélancolie n’en continue pas moins de voisiner avec le fantastique. Le cortège des démons et des sorcières est rejoint par Saturne (Baldung Grien), le loup-garou (Cranach l’ancien), un Nabuchodonosor bestial (Blake) et de monstrueux cannibales (Goya). La chronologie est une nouvelle fois bouleversée par une division en chapitres pour partie artificielle. Intitulée « Les enfants de Saturne », cette section permet certes de relier la Renaissance au Classicisme, mais en poussant ce dernier jusqu’à des peintres (Blake notamment) qu’on aurait vus plutôt parmi les préromantiques.

A l’âge classique, la mort redevient l’objet principal de la mélancolie, qu’elle prenne la forme de vanités peintes ou de coffrets funéraires. Une sombre et belle vanité attribuée à Philippe de Champaigne retient entre toutes l’attention. Mais c’est une œuvre de Domenico Fetti (La Mélancolie) qu’on jugera peut-être la plus significative : un homme agenouillé, accablé de chagrin, médite sur un crâne, le bras posé sur un livre qui peut être sacré. Magnifique aussi est La Madeleine à la veilleuse, un tableau en clair-obscur de Georges de La Tour, dont la méditation sur la mort est plus mélancolique que tragique.

Le Siècle des Lumières adoucit la mélancolie sans perdre de vue l’horizon de la mort. Avec Les Cousines de Watteau notamment, la peinture française lui donne un charme nouveau qui annonce le romantisme sans en avoir le fond morbide. Mais le préromantique Füssli unit dans la mélancolie la mort et la folie : son saisissant Ezzelin Bracciafino devant Meduna qu’il a tuée pour son infidélité lorsqu’il était absent en Terre sainte suggère le suicide après le crime. Plus largement, la mort revient en force au tournant du siècle avec les belles œuvres néo-classiques de Jacques Sablet (Elégie romaine, dite encore Double portrait au cimetière protestant de Rome) et de Pierre Henri de Valenciennes (L’Eruption du Vésuve arrivée le 24 août de l’an 79 après J.-C.).

Avec Friedrich commencent le romantisme et un nouvel âge de la mélancolie. La mort se cache derrière le sentiment du vide, la mélancolie se fait plus métaphysique que psychologique. L’une des œuvres phares de Friedrich, Le Moine devant la mer, une silhouette perdue dans l’immensité d’un paysage tourmenté, pourrait servir d’illustration à la philosophie de Kierkegaard. Des gravures du grand peintre romantique allemand montrent toute l’étendue de son art, en particulier sa Femme au bord du gouffre qui confirme sa conception existentialiste de la mélancolie. Le désespoir n’est jamais loin de la mélancolie comme en témoignent aussi les œuvres des Anglais John Martin (Le Dernier homme – une figure ici plus christique que nietzschéenne avant la lettre) et Henry Wallis (La mort de Chatterton), mais les limites du sujet sont-elles respectées ?

Tout le long du XIXe siècle, les maîtres français traitent la mélancolie, tantôt sur le mode de la désolation (La Tempête ou l’épave de Géricault), tantôt sur celui de la rêverie (La Mélancolie de Corot). Peu représenté, l’impressionnisme eût mérité de l’être plus tant ses liens avec une vision mélancolique du monde paraissent évidents. Le symbolisme a plus de chance : Böcklin supplée à l’absence de Moreau avec l’une de ses belles versions de L’Ile des morts. Et puis l’exposition permet de découvrir les sombres tableaux de l’Allemand Franz von Stück (Lucifer, L’Enfer), qui a une parenté avec Odilon Redon, présent quant à lui avec des œuvres mineures.

Le XXe siècle symboliquement s’ouvre sur un tableau de l’Américain Eakins, Le Penseur, qui rappelle moins Rodin qu’il n’annonce Hopper et ses belles représentations de la mélancolie moderne, fille de la solitude urbaine (Cinéma à New York, Une femme au soleil). Mais avant Hopper, l’Europe mieux que l’Amérique reste le continent de la mélancolie. Munch en donne sa version (Melancolia III), un personnage noyé dans des ombres crépusculaires, qui est là pour illustrer l’assimilation alors nouvelle de la mélancolie à la dépression. Dans l’entre-deux-guerres, les peintures allemande et italienne semblent premières dans une représentation moderniste voire futuriste de la mélancolie : Dix (Mélancolie) et Grosz (Le Malade d’amour) rivalisent de talent avec Sironi (Femme et paysage) et De Chirico (Les Jeux terribles). Entre l’Antiquité et la Modernité, la mélancolie s’est comme retournée : le tombeau vide de De Chirico (cf. Mélancolie) a succédé au vide sans sépulture que redoutaient les Anciens.

C’est étonnant et c’est injuste : la peinture française est quasiment absente de la salle consacrée au XXe siècle. Au bout du compte, une œuvre triomphe (de l’Australien Ron Mueck), une sculpture représentant un géant nu, assis et prostré. La résine de polyester dont elle est faite lui donne un incroyable air de vérité. L’œuvre est dite Sans titre, mais elle est symbolique à plus d’un titre. Elle inaugure le XXIe siècle d’une manière qu’on jugera inquiétante ou grotesque.

jeudi, 08 décembre 2005

Constable, entre romantisme et réalisme

Constable est le peintre du vrai, le père du vérisme en peinture. Longtemps mythifiée ou idéalisée, la nature devient naturelle avec lui. Les champs cultivés remplacent les forêts ou les rochers antiques. Les ciels auparavant sereins, ou faussement tourmentés, se chargent d'épais nuages et d'incertaines menaces. L'empyrée s'épaissit tout en se vidant. L'horizon s'élargit tout en se limitant. Ce n'est pas l'invention du paysage, mais la découverte du paysage naturel, laissé à lui-même ou à l'homme, livré à l'orage et à la charrue, déserté par les dieux et les légendes.

Avant Constable, les Hollandais, Hobbema ou les frères Ruysdael, avaient sans doute mis le paysage à l'honneur, mais en faisant ressortir l’arrière plan des fêtes et des foires flamandes ; c'était seulement la fin du folklore paysan, pas encore le sacre de la nature. Avec Constable, la nature devient le sujet principal, le paysage devient le portrait du peintre romantique. Mais le romantisme porte déjà en lui le ressort de son dépassement : la recherche de la vérité vraie sape les fondements du romantisme artistique ; le rêve ou la mélancolie d'une nature émancipée, redevenue elle-même, se réfugie dans la vérité positive, dans une vérité scientifique qui nie la rêverie. Comme une fatalité, le réalisme succédera au romantisme.

23:15 Publié dans Beaux-arts | Lien permanent | Tags : histoire de l'art

lundi, 28 novembre 2005

Le Mystère Monsù Desiderio

Les tableaux de Monsù Desiderio ne sont pas seulement de belles marqueteries à contempler. Il y a de la métaphysique derrière cette physique toute baroque, de l'ésotérisme encore à percer derrière cet esthétisme très daté. Ce monde-là, comme celui de Piranèse qu'il annonce, est entre la rêverie et le cauchemar, la vision et la prophétie, et la question reste ouverte sur les intentions, métaphysiques ou politiques, de ces deux peintres qui n'en font qu'un, ajoutant ainsi du mystère au mystère. Bref, c'est le mystère fait art.

jeudi, 17 novembre 2005

La Fausse Sérénité de Magritte

L’œuvre de Magritte, qui dénonce la fiction de la représentation, est elle-même trompeuse. La fixité de son style fait croire à une immobilité de l’esprit comme son ironie à une sérénité profonde. Dès le départ, il est vrai, apparaissent les dominantes de sa peinture : pureté des lignes et des couleurs, étrangeté des situations, éloquence des titres, obsession du bleu horizon, omniprésence des nuages. La dynamique de l’œuvre de Magritte, il ne faut pas la chercher comme pour la plupart des peintres dans une diachronie, mais dans une synchronie. C’est un mouvement permanent qui la commande et qui alternativement met la réalité au bord du rêve et le rêve au bord du cauchemar.

L’étrangeté, faussement tranquille, peut devenir inquiétante. En vérité, la menace n’est jamais loin. Elle apparaît évidemment dans La Bataille de l’Argonne qui doit être rapprochée de La Vie ordinaire : dans un cas, un nuage et un rocher placés parallèlement surplombent un paysage campagnard endormi ; dans l’autre, le rocher est placé au-dessus du nuage qui le cache d’une boule argentée symbolisant la fleur chez Magritte. La menace est réduite à sa plus simple expression dans La Malédiction où elle prend la forme d’un unique cumulus. Généralement, elle apparaît dans un contraste entre l’azur et la nuée, mais aussi dans une double temporalité, entre la permanence et la finitude. Même figée dans le marbre, la beauté du monde toujours est menacée : un nuage n’est jamais loin d’un buste de femme à l’antique. Insaisissable et flottant comme un nuage, le temps devient lourd et écrasant comme la pierre dont est faite une pyramide de lettres (L’Art de la conversation IV) ou une chaise monumentale où repose une petite chaise en bois (La Légende des siècles).

L’insolite néanmoins l’emporte sur l’inquiétant, qu’il prenne la forme d’un visage caché par une pomme (Le Fils de l’homme) ou d’une pluie d’hommes au chapeau melon (Golconde). Même sous la nuée menaçante, le monde peut s’irréaliser en se dédoublant comme dans L’Empire des lumières, où un ciel de jour se superpose à un paysage de nuit éclairé par un lampadaire de ville. D’une manière plus éclatante encore, l’imaginaire triomphe du réel dans Le Château des Pyrénées, qui couronne un rocher en lévitation au-dessus de la mer et qui logiquement, tout comme les châteaux construits en Espagne qu’il symbolise, pourrait avoir pour sous-titre : le rêve plus fort que la mort. C’est ce qui fait de Magritte, en dernière analyse, un peintre profondément surréaliste. Au fond, un poète plus qu’un métaphysicien.

12:50 Publié dans Beaux-arts | Lien permanent | Tags : magritte

samedi, 22 octobre 2005

Une théorie dans l'oeil

L'amateur d'art ne sait plus regarder les œuvres artistiques autrement qu'en naturaliste : il a une théorie évolutionniste dans l’œil.

11:25 Publié dans Beaux-arts | Lien permanent | Tags : sentences

jeudi, 15 septembre 2005

Gustave Moreau en son musée

Le musée Gustave Moreau est situé près de la Trinité, dans le beau quartier qu’on appelle la Nouvelle Athènes depuis les années 1820. L’ancienne maison-atelier de Moreau abrite le musée. Elle a été transformée à cet effet du vivant même du peintre. Certaines pièces, depuis, ont été réaffectées, et de nouvelles ont été créées. L’appartement du premier étage est un intérieur bourgeois bien de son temps, contrastant avec le faste de sa peinture. La chambre et le boudoir sont à eux seuls un musée de souvenirs en même temps qu’un musée des œuvres des amis de Moreau, des peintres eux-mêmes : Chassériau, Degas et Fromentin notamment. Il est frappant de voir à quel point Moreau, Chassériau à part, leur est éloigné par la peinture. Deux femmes ont régné sur lui : sa mère et sa maîtresse, Alexandrine Dureux. On n’ose imaginer la cohabitation entre les deux femmes ; mais on comprend leur place, leur influence, leur ascendant peut-être. Tout cela a un parfum de matriarcat.

Les deuxième et troisième étages correspondent à l’ancien atelier où désormais sont exposées les œuvres de Moreau, peintures, dessins, sculptures. Le deuxième étage est celui des peintures monumentales, parfois pompières, parfois remarquables, dont une retient particulièrement l’attention : Les Prétendants. C’est une représentation symbolique du pouvoir, sacralisé à l’antique, mais environné par le crime. La sacralité est là pour lui conserver une apparence de pureté, mais c’est bien une impression de désacralisation qui l’emporte. Le Prométhée foudroyé aussi est une belle chose, où le titan s’effondre sous les coups d’un ciel vidé de ses dieux. Deux versions sont proposées des Chimères : une noire, presque indéchiffrable, non loin de la blanche, la plus connue. La mythologie ici est noyée dans un enchevêtrement de chairs qui ressemble assez à une orgie.

Au troisième étage, se trouvent de nombreuses œuvres remarquables, parmi les plus fameuses du peintre : les variations autour de Salomé, La Vie de l’humanité, Le Triomphe d’Alexandre le Grand. Cette dernière œuvre est encore celle qui fascine le plus. Il s’agit du triomphe indien d’Alexandre, du dernier triomphe correspondant à la plus grande expansion de son empire. Alexandre est installé sur un trône monumental dans un paysage sombre et montagneux de l’Inde du Nord. Moreau a couvert le tableau de lignes blanches, géométriques, caractéristiques de l’art indien, pour situer le lieu du triomphe. On y sent la fin de la conquête, la fatigue du conquérant, la fragilité de l’empire. D’autres œuvres méritent d’être mentionnées : la réplique d’un tableau de Carpaccio, une série sur Léda, une autre sur la débauche. L’érotisme qui occupe une grande place chez Moreau est toujours débridé ou tragique. Sous le regard de la mère et de la maîtresse, il semble hésiter entre la liberté et la malédiction.

14:30 Publié dans Beaux-arts | Lien permanent