dimanche, 24 octobre 2021
Illusions perdues ou les Désillusions de la Restauration
Illusions perdues de Xavier Giannoli est une passionnante adaptation – bien que partielle – du roman de Balzac. On y retrouve le théâtre de la comédie humaine, avec ses rituels d’introduction, ses règles ouvertes et cachées, ses trompeuses illusions, ses chausse-trappes fatales et son infinie cruauté (le plus cruel des personnages n’étant jamais celui que l’on croit). Il y a l’idée presque métaphysique que tout se tient ou que tout le monde tient tout le monde pour le meilleur et pour le pire – mais surtout pour le pire. Il y a aussi le tableau d'une nouvelle société, née paradoxalement de la Restauration, qui est déjà si moderne qu'elle ressemble à la nôtre.
Sans trahir Balzac, le réalisateur met l’accent sur les vices de cette société manipulée par la presse et gouvernée par l’argent, plus encore que par la vieille aristocratie (qui se laisse duper par le faux retour à l’ancien monde) ou la royauté restaurée (qui elle-même est dépassée par le nouveau monde né sous ses yeux). Si le film a par moments un rythme tourbillonnant, c’est pour mieux restituer une époque folle à donner le tournis, mais sans jamais perdre le spectateur. Le soin apporté aux décors, aux costumes, aux musiques (le choix de la musique entêtante de Rameau en particulier) et surtout aux dialogues, qui pétillent comme du bon champagne, fait de ce film une fête amère, funèbre et somptueuse.
23:42 Publié dans Kino | Lien permanent | Tags : balzac
jeudi, 27 juin 2019
A propos du charme de Modiano
Modiano charme par son rapport au temps, fait de nostalgie et de regret, qui, nonobstant la question de la double identité, est plus universel que particulier dans le fond. L’origine de son succès et même de son statut – certes pas usurpé, mais quelque peu gonflé – de classique contemporain ne s’explique pas autrement. D’autant que sa sensibilité délicate et névrotique à la fois s’exprime dans un style simple, presque naïf, pour ne pas dire sans relief, au contraire de celui de Balzac ou de Proust, qui ont donné de plus belles pages sur l’irréversibilité ou la fuite du temps.
13:47 Publié dans Lettres | Lien permanent | Tags : modiano, balzac, proust
lundi, 12 septembre 2005
Les bonheurs imaginaires ou présumés
Selon La Rochefoucauld, « On n’est jamais si heureux ni si malheureux qu’on s’imagine. » Balzac, semblant lui répondre, dit presque la même chose : « Nous ne sommes jamais ni si malheureux, ni si heureux qu’on le dit. » Balzac est moins fin que La Rochefoucauld, mais les deux ont raison. En matière de bonheur comme de malheur, la rumeur se trompe comme l’imagination.
10:55 Publié dans Faux-semblants | Lien permanent | Tags : moralistes, la rochefoucauld, balzac