dimanche, 24 octobre 2021
Illusions perdues ou les Désillusions de la Restauration
Illusions perdues de Xavier Giannoli est une passionnante adaptation – bien que partielle – du roman de Balzac. On y retrouve le théâtre de la comédie humaine, avec ses rituels d’introduction, ses règles ouvertes et cachées, ses trompeuses illusions, ses chausse-trappes fatales et son infinie cruauté (le plus cruel des personnages n’étant jamais celui que l’on croit). Il y a l’idée presque métaphysique que tout se tient ou que tout le monde tient tout le monde pour le meilleur et pour le pire – mais surtout pour le pire. Il y a aussi le tableau d'une nouvelle société, née paradoxalement de la Restauration, qui est déjà si moderne qu'elle ressemble à la nôtre.
Sans trahir Balzac, le réalisateur met l’accent sur les vices de cette société manipulée par la presse et gouvernée par l’argent, plus encore que par la vieille aristocratie (qui se laisse duper par le faux retour à l’ancien monde) ou la royauté restaurée (qui elle-même est dépassée par le nouveau monde né sous ses yeux). Si le film a par moments un rythme tourbillonnant, c’est pour mieux restituer une époque folle à donner le tournis, mais sans jamais perdre le spectateur. Le soin apporté aux décors, aux costumes, aux musiques (le choix de la musique entêtante de Rameau en particulier) et surtout aux dialogues, qui pétillent comme du bon champagne, fait de ce film une fête amère, funèbre et somptueuse.
23:42 Publié dans Kino | Lien permanent | Tags : balzac