dimanche, 05 août 2018
Le Goût d'Ozu
Le Goût du saké montre la résolution à contrecœur d’un père veuf qui pousse sa fille à se marier pour qu’elle ne devienne pas une vieille fille. Il y a dans ce dernier film d’Ozu sorti en 1962 un concentré de toute son œuvre, de son style poétique et géométrique à la fois (caractérisé par une succession de plans fixes, centrés ou parfois décentrés), de son regard doux-amer sur un Japon traditionnel qui disparaît (entre la réduction de la famille étendue et le développement de la société de consommation). Ozu a su être le cinéaste de la transition historique du Japon d’après-guerre avec des principes formels tendant à l’intemporalité artistique. C’est dans cette dualité que réside la grandeur du réalisateur de Voyage à Tokyo.
La matrice de son œuvre est dans ses carnets, où il se révèle philosophe autant qu’artiste. On y trouve cette excellente maxime : « Pour les choses qui n’en valent pas la peine, suivre la mode. Pour les choses importantes, suivre la morale. Pour l’art, ne suivre que soi. » Il y a chez lui du moraliste tranquille, du nationaliste résigné ou du conservateur ironique, l’ironie étant une forme sublimée de la résignation. Et au bout de cela, il y a une philosophie du vide que symbolise le « rien » qui figure sur sa tombe. On peut y voir une ultime ironie ou la négation de toute forme d'espérance. Ozu, que l’on croit seulement cinéaste, est un maître de sagesse.
01:52 Publié dans Kino | Lien permanent | Tags : ozu